Trois longues années séparent Black Holes & Revelations du terrible Absolution. Autant dire que le groupe n’avait aucune excuse en terme de préparation, d’élaboration et de peaufinage de son quatrième bébé. Mais avec un album de Muse, on peut s’attendre à n’importe quoi ou au mieux, ne s’attendre à rien d’autre qu’à une entité à part, comme si un groupe différent se présentait à chaque fois au public. Et cette dernière optique est nécessaire pour appréhender BHR d’un bon oeil.
Pour une fois, commençons par parler de l’artwork: imaginé et imagé par le créateur du célèbre triangle de Pink Floyd, Mr. Storm Thorgerson, elle présente quatre hommes assis autour d’une table sur la planète Mars où l’on peut distinguer des petits chevaux pour un clin d’oeil flagrant au Nouveau Testament (pour ceux et celles qui auraient perdu du temps à s’y intéresser). Le parallèle entre la pochette et la musique est un peu plus clair qu’à l’accoutumée, notamment en terme de prise de risques, car cette dernière est la première chose qui nous tape à l’esprit à l’écoute de Black Holes & Revelations. On a connu Muse comme enterrant l’auditeur avec des murs de sonorités électriques ou des claviers uniquement accompagnés de la voix envoûtante de Matthew Bellamy, mais ici c’est une toute autre histoire. Si Absolution, malgré une qualité irréprochable, donnait une petite impression d’en faire trop, celui-ci mise sur une plus grande légèreté, une aération instrumentale qui fait profiter du moindre petit détail dès la première écoute. La guitare, aussi sèche que saturée, a le maître mot ici, pour des compositions plus simplistes mais non moins inspirées. On pourrait croire que le groupe en était arrivé à un point de non-retour en 2003, mais finalement c’est bel et bien une nouvelle voie que le trio a décidé d’entreprendre.
Ca démarre sur la mystérieuse « Take A Bow » qui n’enfreint pas la règle des introductions: un clavier hypnotique tout juste rythmé sur une grosse caisse forme un premier morceau convenu mais tout à fait dans l’esprit du groupe. Une bonne mise en bouche avant de démarrer sur des chapeaux de roues avec le rock doux de « Starlight » ainsi qu’avec l’approche électro du tube « Supermassive Black Hole » et son riff ultra-simpliste mais aussi efficace qu’un bon vieux Queen dont l’influence est de plus en plus palpable. Globalement, l’album est rarement nerveux, avec des titres très aérien comme « Soldier’s Poem » ou « Hoodoo », mais le point fort de BHR sont ces morceaux à la fois rythmé et planant à l’instar de « Map of The Problematique » sur laquelle Dominic Howard offre une prestation de batterie digne de son potentiel, l’épique « Invincible » , « City of Delusion » inspirée du flamenco et le final renversant, « Knights of Cydonia ». Et bien sûr, on retiendra aussi « Assassin » qui comme son nom l’indique, assène l’auditeur d’un riff proche du métal histoire de mettre un coup de bourre dans une ambiance à la limite du soporifique, ou dans un sens moins péjoratif, plus relaxante que ce dont Muse nous avait habitué jusqu’ici.
Ceux qui s’attendait à une multitude d’effets ici et là s’en verront surpris d’avoir à faire à quelque chose d’encore plus accessible qu’auparavant, mais sans jamais tomber dans le cliché. Contrairement à ce que beaucoup pensent, Muse n’essaye pas d’avancer en reculant, et réussi même à élargir son public de manière humble et réfléchie. Un très bon album qui fait honneur à l’un des groupes de rock les plus créatifs de ces dix dernières années.
Laurent.
mon album préféré de muse 🙂