On connaît le béguin des compositeurs français de musique électronique pour le disco (Daft Punk, Justice) et la funk (Cassius, Supermen Lovers), mais qu’en est-il du jazz, genre à la base de bien des choses qui n’a cessé de fusionner avec les courants musicaux lui faisant obstacle pour les rendre plus complexes (jazz-rock), plus sages (hip-hop jazz) ou plus intellectuels (électro-jazz). N’ayant aucune affiliation avec un certain club de football parisien mais plutôt avec sa ville natale, Saint-Germain-en-Laye (78), M. Ludovic Navarre plus connu sous le patronyme de St. Germain, grand amateur de (deep) house music et de jazz, s’est un jour lancé dans un mix des genres qui a donné quelque chose d’à la fois orignal et en plein dans la mouvance nu-jazz émergente.
Ainsi naît Boulevard en 1995 qui rencontre un franc succès outre-Manche, puis cinq ans plus tard le plus célèbre Tourist, véritable bande sonore urbaine mais aussi bande sonore publicitaire ; rien de péjoratif étant donné la qualité du contenu de l’album. La première chose qui frappe lorsqu’on écoute St. Germain, c’est cette symbiose parfaite entre des musiciens virtuoses du jazz et la musique électronique de Ludovic Navarre. Plusieurs influences parsèment le disque: pur jazz (l’hymne «Rose Rouge»), hip-hop jazz («Land Of…», «What You Think About»), funk («So Flute»), soul («Sure Thing»), trip-hop/dub («Montego Bay Spleen», «La Goutte d’Or» et ses inspirations africaines) et house («Latin Note», «Pont des Arts»). Et même si 2-3 titres paraissent un peu long à force, il est en revanche facile de ne plus faire attention aux répétitions incessantes d’un même plan, qui sont la base des morceaux de l’artiste.
Aussi bien compétant dans la maîtrise du jazz que dans la manipulation des platines, Ludovic Navarre est un artiste complet qui a mystérieusement disparu du circuit dans la deuxième moitié de la dernière décennie. Des informations ont certainement due m’échapper car on ne peut pas stopper son activité musicale comme ça, dans le rock, on commence à avoir l’habitude, mais dans le jazz, quand même ! «I want you to get together…», qu’y dit le St. Germain… hélas, plus ça va, plus c’est chacun pour sa tronche, alors tant pis pour ceux qui passent à côté de Tourist, encore plus savoureux entre deux albums de hard.
Laurent.