The Erkonauts – I Shall Forgive

The-Erkonauts-I-Shall-Forgive-LP-63396-1©2017                           genre: Metal

Le Metal traverse aujourd’hui une période difficile, pour ne pas dire de déclin. Paf ! Il fallait balancer ce constat d’emblée, pour faciliter l’entrée en matière. Depuis quelques années, le public chevelu, lassé d’entendre les mêmes productions, se rase les cheveux sur les côtés, se tatoue des roses et s’émeut davantage avec des groupes comme Converge ou Code Orange (fantastiques soient-ils), qui proposent effectivement de la nouveauté à chaque album, et se portent leaders de nouvelles façons de penser. Le culte du Diable, c’est has-been.

Pourtant, il a toujours existé dans le metal, des groupes qui n’en ont rien à foutre des courants en vogue. Évidemment, la plupart sont victimes d’incompréhension ou de totale ignorance par manque de curiosité. The Erkonauts fait partie de ceux-là. Originaire de Genève, ce quatuor, composé d’ex-7-Tone, Djizoes et Sybreed, a posé les bases d’un son typique dès le premier album I Did Something Bad sorti l’année dernière sur le label norvégien Indie Recordings. Deux guitares au son chaud, un batteur technique mais pas trop et un chanteur/bassiste exceptionnel -pour les deux- font que ce groupe est à mes yeux au-dessus de la masse aujourd’hui. Si le premier album était déjà une bonne surprise, I Shall Forgive est une branlée magistrale qui met du baume au cœur. 9 titres cette fois-ci, mais tous identifiables. « Little Mary » entame l’album avec un slap de basse -comme « The Great Ass Poopery » sur le précédent- et nous fait comprendre d’office que le groupe a bossé son univers à donf. Plus efficace, tu meurs. La suite nous laisse sur les genoux jusqu’à la dernière seconde.

Il serait incommodant de citer chaque titre et d’en définir son authenticité. Grossièrement et quitte à être à côté de la plaque, mais pour donner une idée, je dirais que The Erkonauts emprunte son ingéniosité aux groupes phares que sont Mastodon, Gojira et Enslaved, soient 3 groupes ayant chacun une identité très forte, donc rien d’insultant, bien au contraire. Chaque détail compte, en particulier les solos qui n’ont rien de prétentieux apporte la même touche de grâce que ce chant clair disséminé un peu partout. Le groupe a réussi à se rendre plus accessible tout en se concentrant sur les arrangements qui offrent un son des plus agréables, ni trop clean, ni trop brouillon.

Estampillé progressive metal, cet album n’a absolument rien à voir avec tout ce qui fait dans le style, que ce soit du côté théâtrale de Dream Theater que des riffs 8 cordes d’After the Burial. Si vous êtes en quête de son frais dans le metal, allez faire un tour sur le site d’Indie Recordings, car vous y trouverez aussi Fleshkiller et In Vain avec qui The Erkonauts forme le trinôme gagnant de 2017.

Laurent.

Line-up: Ales Campanelli – Bass & Vocals
Los Sebos – Guitars
Bakdosh Puiatti – Guitars
Kevin Choiral – Drums

The Erkonauts – Tales of a Thousand Lives

Extol – Extol

Extolgenre: death progressif            ©2013

Non, le metal n’a pas fini de nous surprendre. Non, les groupes contemporains ne sont pas tous des remixes de courants lancés ces vingt dernières années. Pour un peu qu’on les connaisse, les chrétiens norvégiens d’Extol, sur le terrain depuis 1993, ont toujours su défier avec brio la loi du « je vais jouer ça pour que ça marche ». Les informations brumeuses du groupe depuis la sortie de l’excellent « The Blueprint Dives »  nous ont laissé croire que l’aventure était définitivement terminée, mais la santé de Peter Espevoll (chant) s’améliorant, les musiciens restant à savoir David Husvik (batterie, choeurs), Ole Børud (guitare, basse, choeurs) et Peter donc n’ont pas chômé en 2012 et pour dire, ont fini par pondre un des albums metal les plus surprenants de 2013, sobrement intitulé « Extol », autoproduction mixée par le grand Jens Bogren (Opeth, Devin Townsend, Soilwork).

Tel un raz-de-marée, ce cinquième opus nous est arrivé dans la tronche avec la ferme intention de nous immerger dans un metal progressif au fort penchant death, original et terriblement accrocheur. Rares sont les formations qui associent modernité, intensité et mélodie avec autant de virtuosité, de plus le trio offre une brochette de morceaux plus accessibles que par le passé, agrémentés d’un chant clair magnifique (« Betrayal », « Open The Gates », « Extol ») ou de solos majestueux (« Wastelands », « Ministers ») qui s’opposent à la voix terrifiante de Peter avec une aisance hors-norme. Plus intense que brutal, « Extol » fait parfois penser à Cynic (« Faltering Moves », l’interlude « Dawn Of Redemption ») ou Textures (« Unveiling The Obscure »), s’éloignant par ailleurs du thrash technique de Believer des albums précédents, ainsi le groupe est parvenu à renforcer son identité en privilégiant l’accessibilité sans toutefois dire merde à la technicité.

Un son moderne, frais et sorti des tripes de types qui savent où ils mettent les pieds, contrairement aux américains de Between The Buried & Me dont la liberté artistique, quelque peu similaire, laisse aujourd’hui à désirer. Les amateurs de metal sans barrières prendront leur pied à coup sûr, les autres peuvent tenter l’expérience sachant que cet album ne laisse aucune place au remplissage. Aussi inclassable que tonitruant.

Laurent.

Wolverine – Communication Lost

Genre: progessif mélancolique   ®2011

Non, non et non. Charles Xavier et compagnie n’ont absolument rien à voir avec la création du groupe de métal progressif suédois Wolverine. Il s’agit plutôt d’un quintette n’ayant pas froid aux yeux et qui s’aventure à chaque album dans des contrées atmosphériques tantôt frissonnantes et dépressives tantôt gaies et emplies de sérénité.
Communication Lost est un concept-album basé sur les rapports compliqués qu’a vécu la formation après la sortie de Still en 2006; autant dire d’emblée que tout n’est pas rose à travers ces onze pistes.

Pour donner une idée de l’orientation musicale du groupe, il s’agit d’une croisement entre Pain of Salvation, Opeth époque Deliverance (2003)  et Damnation (2003 aussi) et puis des formations de rock ambient à la Blackfield ou Lunatic Soul. En aucun cas, Wolverine dévoile des onces de bestialité comme on peut facilement se l’imaginer: les morceaux sont relativement dénués d’accélération et de breaks techniques, en revanche la qualité de composition est bien là.

L’intro «Downfall» parvient sans trop de difficultés à imposer une forme d’anxiété. Des nappes de claviers errent et s’entrechoquent pour offrir quelque chose de planant, relaxant mais aussi quelque peu dérangeant. Une belle mise en bouche avant que «Into The Great Nothing» ne déballe son arythmie et ne montre que le groupe a franchi un pas depuis le remaniement de l’orchestre. Une production très raffinée propulse chaque instrument au premier plan même si le chant a toujours été le pilier des compositions. Point de cordes en adamantium mais un son de guitare suffisamment lourd et saturé laisse prétendre qu’il s’agit bien d’un groupe de métal. «Your Favorite War» continue dans cette lourdeur qui s’avère être plus accessible que les nombreux plans calmes qui parsèment Communication Lost.

Ceci dit, lorsqu’on y met un peu du sien, entrer en symbiose avec des morceaux comme «Embrace» porté par des percussions…percutantes et le charismatique frontman Stephan Zell ainsi qu’avec la touche électro-goth de «Pulse» et le duo piano/violon de «What Remains» procure un plaisir qu’il n’est pas donné à tout les artistes de satisfaire. Et le point fort de cet album est le morceaux qui le clôture, le démentiel «Communication Lost» aux allures avant-gardistes avant que «A Beginning» ne termine définitivement le tout en reprenant le thème de l’intro.

En résumé, l’album regorge de petits détails intéressants et bien exécutés pour un résultat sans réelles failles, mais il faut dire que l’on a pas affaire non plus à quelque chose de vraiment puissant et purement original. Reste que Wolverine, à défaut d’avoir apporté sa griffe (…), a fait preuve d’imagination dans le domaine et a su faire passer les émotions quasiment les doigts dans le nez. A écouter à tête reposée plus qu’au milieu d’un champ de bataille.

Laurent.