Anciennement Social Justice, Downset est l’un des tous premiers groupes à avoir mélangé hardcore et hip-hop, précédant de peu Biohazard ou Dog Eat Dog. Peu connu du grand public pour sa faible parution dans les médias, le quintet n’en demeure pas moins marquant pour la qualité de ses albums qui mélangent groove et gros hardcore urbain, le plus populaire étant le premier Downset (1994) avec le fameux « Anger ». Mais en terme de qualité, Check Your People détrône largement le reste de sa discographie, surpassant même à mon humble avis le légendaire Urban Discipline (1992) de Biohazard grâce à la puissance et à la diversité dont il fait preuve.
L’entrée chez Epitaph (le label de Brett Gurewitz, frontman de Bad Religion) offre moins d’impératifs à la clique de Rey Oropeza (chant) qui prend le temps de composer un vrai album studio, avec des morceaux aux structures plus complexes et moins machinalement destinés à la scène. En résulte Check Your People, une vraie tuerie où aucun titre n’est à mettre de côté. La photo en guise de pochette a été prise spontanément, illustrant certes avec violence mais parfaitement le coup de gueule d’Oropeza sur l’insouciance des gouvernements vis-à-vis de leurs peuples dans les pays pauvres (« check your people » signifie « intéressez-vous à votre peuple »). Beaucoup mieux produit que ces prédécesseurs, ce troisième rejeton ne laisse aucun instrument en arrière-plan, portant à son apogée le talent des californiens avec une entrée en matière violente (« Fallen Off » suivi du pesant « Coming Back »). Rogelio Lozano (guitare) n’a jamais été aussi inspiré pour les riffs, en témoigne « Together », et d’une manière générale, la plupart des titres possèdent un refrain fédérateur (mention spéciale à « Coming Back », « No Home (Steady!) » et « Chemical Strangle ») sans jamais laisser place à la facilité.
L’inspiration est plus réfléchie, n’en déplaise aux aficionados du hardcore « old-school » et taillé pour la scène, appuyée le travail de Randy Staub qui présente un Downset moins brouillon et plus ouvert aux sonorités metal. L’énergie propre au groupe n’a rien perdu de sa saveur, le son est moins épais, plus froid, en totale symbiose avec le contexte des paroles. Downset et Do We Speak A Dead Language? sont de bons albums de hxc, mais Check Your People sort des sentiers battus , se frayant un chemin à travers la vague nü-metal prédominante. Toujours d’actualité, un album dont l’aura mystérieuse surpasse le succès éphémère de bien d’autres. Une pépite.
Laurent.