Beck – Morning Phase

beck-morning-phasegenre: pop-folk                            ©2014

À 43 ans, le respecté mais encore trop peu connu du grand public Beck Hansen n’a plus grand chose à prouver. Auteur-compositeur-interprète, producteur, ce génie californien ne fait plus l’unanimité auprès des critiques depuis Sea Change (2002) et pourtant, l’imagination a belle et bien répondu à l’appel pour chaque album sorti depuis. Les bizarreries n’ont pas plu à toutes les oreilles car beaucoup d’entre elles cautionnent le Beck intimiste, armé de sa guitare folk, de quelques claviers et empli de mélancolie, c’est pourquoi Morning Phase a été attendu au tournant après la sortie du single « Blue Moon » en 2013.

Retour donc à la pop-folk qui a fait le succès de Sea Change. La comparaison avec ce dernier semble quasi-inévitable et surement rébarbative à mesure que les critiques s’enchaînent sur le web, cependant il ne s’agit pas non plus d’une pâle copie de son aîné car Morning Phase se veut plus positif, tel une sorte d’alter-ego ensoleillé mais tout de même protégé par un chapeau de paille. Rythmes lents, ambiance relaxante, Beck se la joue bande originale de film américain indépendant et Dieu sait comme ce registre lui va à merveille, en témoigne les enchanteresses « Morning » et « Blue Moon », « Say Goodbye » et son absence de réverb’ qui nous rappelle que la voix nue de Beck est elle aussi remarquable, « Wave » et sa petite symphonie d’arrière-plan ou le puissant final « Waking Light » qui termine l’album sur une avalanche de sonorités 70’s.

Production toujours aussi parfaite, très peu de surprises mais des compositions toujours aussi prenantes, c’est plus qu’il n’en faut pour apprécier un album de Beck. Entrer dans une comparaison facile avec Sea Change impose des barrières regrettables en vue de la qualité sonore de ce douzième album. Ici, la magie opère, en espérant tout de même que la prochaine offrande, probablement extravagante, nous donne une bonne leçon de créativité. Laissons faire le maître.

Laurent.

DeVotchka – 100 Lovers

   Genre: gypsy folk                ®2011

Subtil monde en musique,
Apporte-nous cet artifice,
Qui après quatre œuvres féeriques,
Évoquera le goût du meilleur pain d’épice.

Il ne tardait que trop de le découvrir,
Puis 100 Lovers jaillit comme un chat dans la nuit,
C’est ainsi qu’il commença à conquérir,
Ce monde en moi que je pensais détruit.

C’est de ce désert de l’Arizona,
Que proviendra la nouvelle offre de DeVotchka,
Polka germanique ou rock mariachi,
C’est dans ces eaux que le groupe a surenchéri.

Les larmes aux yeux,
Il n’y eut guère mot pour quantifier,
Puisque c’est la qualité qui est cette fois privilégiée,
Les longues plages de jadis ayant fait leurs adieux.

Beauté fatale qu’elle est,
Ta musique née du folklore et du prestige,
Transforme l’âme en un nuage blanc épais,
Nul doute, tout ça tient du prodige.

Merci à toi ô grand maître des émotions,
Que je nommerai Mr. M le Gai Pinson,
D’avoir émis en chacun de nous,
L’espoir d’un monde meilleur et sans remous.

Laurent.

Beck – Odelay

Genre: Beck                        ®1996

Alors que le monde est contaminé par l’imparable «Loser», Beck, désireux d’exposer toujours plus son immense potentiel, compose en 1996 l’album le plus éclectique de sa carrière. Car s’il y a bien un terme qui colle à la peau de l’artiste, c’est «innovation». Mêler autant d’inspirations pour pondre des albums qui partent dans tous les sens avec pas grand chose n’est pas monnaie courante en cette période où le rock alternatif commence sérieusement à squatter les ondes.

Mellow Gold ayant surpris bon nombre de personnes, il fut difficile d’appréhender de manière sereine la future galette du bonhomme. Allait-il nous resservir cette même patte country/folk/blues bizarroïde et dissonante? Affirmatif. En effet, Odelay reprend les éléments présents sur son prédécesseur mais se permet de les recadrer dans un contexte plus pro, moins bordélique.

En tout cas le livret lui pourrait laisser croire le contraire: des dizaines d’images n’ayant rien à voir entre elles ont été superposées (un cheval alcoolique, un cafard avec un couronne de César, un type sur le trône) par Beck lui-même.

Extrêmement hétérogène avec l’ajout d’instruments inédits comme l’harmonica ou le saxophone, aucun des treize titres présents ne semble avoir de rapport avec ses voisins. Entre chanson rock puissante («Devil’s Haircut» qui contient un sample de «Out of Sight» de James Brown, «The New Pollution», «Novocane», «Minus») et loufoqueries du style «Sissyneck» ou «Lord Only Knows», Beck régale son auditeur, qui tombe en émoi sous la force des ballades que sont «Jack-Ass» (clin do’eil à Bob Dylan avec le sample tiré de «It’s All Over Now, Baby Blue») et «Readymade».

Arrangements à couper le souffle, production signée The Dust Brothers, Odelay est moins célèbre que Mellow Gold et que ses successeurs, mais est certainement le plus représentatif et aussi le plus accessible de l’artiste. Ne pas connaître ce chef-d’oeuvre est une erreur, car il n’y a pas meilleur tremplin pour entrer dans l’univers Beck. Une bonne dose de sensations extrêmes de la part d’un amoureux de la musique et des expérimentations sonores.

Laurent.