Manitas De Plata

Genre: flamenco/musique tzigane

Les Dieux de la guitare ne sont pas exclusifs au heavy metal, et ça on le sait depuis que Django Reinhardt a popularisé le jazz manouche. Associé au flamenco depuis la moitié du XXè siècle, il a permis à la guitare dite « flamenca » de s’exprimer en solo sans accompagnements de cuivres et de percussions propres à la musique tzigane. Parmi les virtuoses de la guitare flamenca, on trouve Sabicas, Carlos Montoya ou Manitas De Plata, ce dernier étant celui qui a le plus attiré mon attention.

Pour une fois, il ne s’agit pas de donner un avis sur un disque mais plutôt de présenter l’artiste lui-même et de vous inciter à vous pencher sur quelque chose de moins populaire chez les jeunes. Attention, Manitas De Plata est une référence du flamenco contemporain, il est celui qui a vendu le plus d’albums de ce genre musical dans le monde, sauf que son nom n’apparaît que trop rarement dans des dicussions sur la musique. A 90 ans au compteur, « l’homme aux petites mains d’argent » continue les représentations dans la région Languedoc-Roussillon -sa terre natale- avec un style inchangé depuis qu’il a découvert Django Reinhardt et tenté, en vain selon lui, de marcher sur les traces de son idole. Mais Manitas n’a rien à envier à son maître spirituel parce que seul, la guitare à l’épaule, il parvient à mettre l’ambiance en enchaînant à une vitesse folle les pulgar et les hammers, techniques utilisées fréquemment dans le flamenco et même dans le heavy metal. Chaque morceau est technique, beau, entraînant, sans artifices et enregistré en une seule prise, si ça ne tient pas du virtuose, où va le monde? Yngwie Malmsteen peut aller se rhabiller -bien que je ne remette pas en cause sa virtuosité, son style est de plus en plus pompeux au fur et à mesure des années- car Manitas a le don de charmer à la moindre note jouée. Quelques fois accompagné d’un chant et/ou de percussions en arrière-plan, le style de Manitas est unique et ne donne jamais l’impression de revivre deux fois le même moment.

A écouter sur une plage autour d’un feu ou en passant la serpillère, peu importe tant qu’on se laisse porter par cette musique douce et entraînant. Allez hop, tous à vos guitares -moi le premier- car il y a encore du boulot avant d’atteindre un dixième de son niveau. Respect, monsieur De Platas.

Laurent.

Gorillaz – Demon Days

Genre: euh…Gorillaz?           ®2005

Suite au succès interplanétaire de Gorillaz (2001), les inséparables 2D (chant), Murdoc (basse), Russel (batterie) et Noodle (guitare), enfermés dans le Kong Studio, s’obstinent à ne pas voir la réalité en face. Pour eux, leur album est un échec total mais il n’est pas question de baisser les bras. Un second est en préparation et… et il est temps de raconter la version réelle des faits car notre monde n’est pas né de l’esprit de Jamie Hewlett, bon sang…

Reprenons: suite au succès interplanétaire de Gorillaz (2001), Damon Albarn profite de cet essor d’inspiration pour se concentrer simultananément sur le septième album de Blur, Think Tank (2003) et sur les prémices de ce qui sera le deuxième album de Gorillaz. Mis en boîte au Studio 13 sous la direction du Dj Danger Mouse, Demon Days a sollicité plus de temps à ses géniteurs que son prédécesseur et nul besoin d’être musicologue pour s’en apercevoir. Moins brouillon tout en incorporant de nouvelles influences, cette nouvelle galette suit à peu près le même schéma à savoir un enchaînement de titres indépendants les uns des autres sans qu’aucun ne soit dispensable.

Plus accessible que Gorillaz, Demon Days a plus d’un tour dans son sac. La musique électronique s’est insérée sans qu’on s’en rende vraiment compte grâce à des petits bijoux comme « O Green World », « All Alone » ou la dansante « Dare ». Quant aux featuring, ils sont là pour casser la barraque. Le premier single, « Feel Good Inc. » avec De La Soul, fait carton plein. Rythmé, à la ligne de basse méga-simple mais si fluide, ce morceau séduit par les rires schizophréniques et le flow unique des rappeurs légendaires qui se fondent dans une musique pop et lumineuse. Neneh Cherry s’occupe des coeurs sur « Kids With Guns » tandis que Bootie Brown balance un rap incisif (surtout pour les tympans!) sur « Dirty Harry » et que l’acteur Dennis Hopper (Easy Rider (1968), le « méchant » dans Speed (1995)) joue les narrateurs sur « Fire Coming Out Of The Monkey’s Head ».

Extrêmement diversifié, Demon Days fût aussi étonnant par sa fraîcheur -encore d’actualité- que l’avait été son aîné. Posant une seconde fois les fondations d’une musique décidément hors-du-commun, ce second joyau à sa place au Panthéon des claques universelles de ma discothèque.

Laurent.

Gorillaz – Gorillaz

Genre: euh…Gorillaz?            ®2001

Qui aurait cru qu’un jour, le chanteur des principaux rivaux d’Oasis, Blur, fonde avec le dessinateur Jamie Hewlett ce qui a tout de la révolution hip-hop des années 2000: Gorillaz. En fait non, pour rester dans la fantaisie, Gorillaz est né de la rencontre entre Stuart (chant), Murdoc (basse), Russel (batterie) et la petite « Noodle » (guitare). Cherchant désespérement à sortir de la routine quotidienne, les quatre musiciens aux horizons musicales divergentes se réunissent dans le modeste Kong Studio de New-York pour enregistrer leur premier album sobrement intitulé Gorillaz.

Dans cet univers fictif, l’album est un véritable échec, ce qui n’est pas du tout le cas dans le monde tel qu’on le connaît. Produit par l’américain d’origine japonaise Dan Nakamura alias « The Automator », Gorillaz est le résultat d’un mélange inédit de musique urbaine à savoir le hip-hop, le dub et le trip-hop. Pour ce faire, Damon Albarn s’est intelligement entouré de Tina Weymouth et de Chris Frantz, respectivement bassiste et batteur du groupe légendaire Talking Heads ainsi que du rappeur Del tha Funkee Homosapien qui pose son flow sur « Rock The House » et la cultissime « Clint Eastwood » et son sample tiré du film Le Bon, La Brute et le Truand, qui fût le premier morceau diffusé sur MTV; le succès est immédiat et la claque monumentale. Les influences multiples font de Gorillaz un album à part entière, ayant une personnalité bien à lui et loin de toute classification qu’on s’obstine tant à attribuer aux disques que l’on écoute. Le deuxième single, « 19-2000 », est également fort appréciable pour son côté bon enfant et enthousiaste. On y note la participation de Miho Hatori sur le refrain et de Tina Weymouth aux coeurs.

Mais ce premier opus ne se limite pas à deux (très bon) singles. Pas aussi inaccessible que ne le sont les albums de Blur post-The Great Escape, Gorillaz offre une musique posée et riche à travers des morceaux qui n’ont à première vue pas grand chose en commun entre eux mais dont chacun se révèle au final être incontournable. De la folk primaire de « Re-Hash » et de « 5/4 » qui ouvrent les hostilités de la plus underground des manières au reggae-dub ensoleillé de « Slow Country » se cachent d’autres sessions dub (« Man Research » et « Starshine » avec la voix évasive de Damon Albarn, pardon, de Stuart!) et des perles comme « Sound Check » ou « Double Bass » où les basses (sans blagues…) n’ont rien de commun dans leur utilisation. Le chanteur de jazz cubain Ibrahim Ferrer s’est fait inviter sur un « Latin Simone » pour une bossa nova moderne, et on se plaît comme ça tout au long de l’album à apprécier des styles que l’on a pas pour habitude de cotoyer.

Se terminant sur des remix des deux principaux singles, Gorillaz fût l’un de mes plus gros kifs de ces dix dernières années. Il fait partie de ces disques que l’on écoute dans n’importe quelle condition, n’importe quand et dont il est évident qu’ils nous suivront toute la vie. La petite révolution Gorillaz (le groupe) a amplement mérité son succès, confirmé à la sortie du tout aussi génial Demon Days. Il ne reste qu’un seul point à régler… »Get the coool! Get the coool shoeshine! »

Laurent.